Quand nous rentrons dans la 5eme maison, nous pensons avoir déjà vu le pire. Nous sommes accuiellis par la mémé de plus de 60 ans, seule avec sa fille et sa servante. Elles ont le regard hagard ne sachant par où commencer face à ces montagne de détritus. Toutes les choses sont engluées dans une boue collante et nauséabonde.
Quand nous lui proposons notre aide et que nous lui confirmons que c’est totalement gratuit, elle fond en larmes et nous avec elle. Elle veut nous empêcher de faire notre devoir de fils et de filles parce que d’une part elle sait par expérience que nettoyer ces maisons est dessus des forces de ces jeunes qui semblent des intellectuels pas habitués aux travaux rudes et d’une autre part il y a dans cette boue tout ce que sont défunt mari lui a laissé. Nous la ressurons de faire de notre mieux afin d’essayer d’effacer le plus de traces de cette folle nuit. Elle n’a eu la vie sauve que grâce à l’intervention de son voisin. Que de leçons ce bénévolat dans cette cité! Le bon voisinage en est un.
Ce monsieur était un érudit et un passionné. Des milliers de livres, de cassettes audio et vidéo, des journaux d’époque, des écrits de maîtres ivoiriens et mondiaux, etc : un trésor inestimable sous dans cette boue.
Éphémère tout le matériel que nous accumulons!
Pelles, raclettes, serpillières, etc en main, nous voila à la tâche, exténués mais volontaires. Nous commençons par la cuisine car la mémé y tiens particulièrement certainement le souvenir des bons moments qu’elle y a passé à préparer de savoureux mets pour son tendre époux et ses enfants. Nous en dégageons les gros éléments et je déploie les autres dans les chambres après les avoir galvanisés. Je reste dans cette cuisine avec une autre personne et je promet à notre mémé de lui donner le sourire dans une heure. Et une heure plus tard..
Plus de 2 heures pour dégager la chambre principale. Nous sommes tous atterrés devant toute cette mémoire qui en un nuit s’est évanouie à jamais. Mémé nous informe que son époux ecrivait tout ce qu’il faisait au cours de la journée. Il enregistrait toutes les émissions radio et télé qui le passionnaient. Des milliers de cassettes audios et vidéo, des milliers de livres dans une boue de 20 cm. Le mur du voisin s’est écroulé déversant des tonnes d’eau et de bout dans sa maison. Si elle avait tenté de sortir de sa chambre, elle aurait été emportée par les flots. Son voisin à ses cris l’a sortie par la fenêtre. LE VOISINAGE! Belle leçon qu’elle ne cessera de nous rappeler durant tout le temps que nous avons passé avec elle.
Quand nous nous opposons pour des choses éphémères de la vie, la nature nous rappelle que ce que nous possédons et dont nous sommes orgueilleux est éphémère et qu’elle – la nature en une nuit peut réduire tout cela en un tas de boue. Tout est poussière et tout retourne à la poussière.
Chez nous à Zikisso, des bâtisses ont été levées à coup de millions. Aujourd’hui elles sont dans un état de décrépitude. Rien que le regret de ces sommes qui auraient pu servir à des choses plus rentables telles que le soutien aux étudiants, à la préparation d’un concours par de jeunes prometteurs ou la construction d’un édifice d’intérêt commun. Ce que j’ai vu dans cette cité a fait de moi un humain nouveau. Nous avons besoin de personnes qui construisent pour l’intérêt et le bien commun plutôt que d’orgueilleux imbus de leurs personnes adeptes de la division.
Parmi ces jeunes volontaires et bénévoles dans toutes les zones sinistrées d’Abidjan, j’ose espérer qu’il y a beaucoup de jeunes originaires de Zikisso. Si tel est le cas, je prie pour qu’ils comprennent que tout est éphémère. Que leur acte citoyen soit une belle leçon de vie. Qu’il en tire le maximum d’enseignement et qu’ils s’en reviennent vers leurs frères et sœurs leur porter le message du bénévolat et du sacrifice pour le prochain. Ce que nos aines n’ont pu nous enseigner, la nature nous l’a apprise à Abidjan.
Que cela soit entendu pour dit!
Nayissako!
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