ÉCONOMIE – Les transferts de fonds vers l’Afrique connaissent une nette augmentation. Mais les tarifs des sociétés de messagerie financière restent élevés. En 2014, selon la Banque mondiale, près de 120 millions d’africains ont reçu 60 milliards Usd envoyés par 30 millions d’africains de la diaspora. Ce montant est supérieur à l’aide publique au développement (56 milliards de dollars en 2014) et aux investissements directs étrangers (50 milliards de dollars). Les transferts de fonds sont en constante augmentation en Afrique et constituent une manne financière susceptible de contribuer au développement des économies du continent.
Pour Patrice Buabua, Secrétaire général de la FIBANK RDC, les flux migratoires sont le principal moteur de cette filière. “Les perspectives démographiques du continent augurent davantage d’opportunités pour ce secteur. La population africaine passera à 2 milliards d’habitants en 2050 contre 830M en 2010. Ces fonds de la diaspora continueront à contribuer aussi bien à la croissance des sociétés de messagerie financière internationale qu’a la situation sociale des africains”, explique-t-il.
En effet, les fonds envoyés par les africains sont beaucoup plus destinés à régler des problèmes d’ordre social: soins de santé, frais scolaires, logement, etc. Cependant, Pour Serge Mbay, Directeur Général de “MoneyTrans” en RDC, les transferts de fonds de la diaspora africaine lorsqu’ils sont judicieusement canalisés et gérés, peuvent constituer des capitaux de départ aux investissements locaux vitaux, susceptibles de résorber la pauvreté. Dans l’atteinte d’un tel objectif, les banques ont un grand rôle à jouer car le réseau bancaire demeure le principal canal de circulation de ces flux financiers. “Les acteurs du système bancaire ont tout à gagner à conscientiser les récepteurs de ces fonds sur les enjeux de l’épargne. Il faut créer des passerelles bancaires, des produits mixtes destinés à inciter cette catégorie de clients à structurer leur relation avec les banques. En ce sens, l’activité de messagerie financière peut être appréhendée comme un accélérateur de la bancarisation en Afrique”, explique le SG de la FIBANK.
Serge Mbay, pour sa part, estime que les pays africains doivent systématiquement organiser la gestion ou la prise en charge de leurs diasporas en leur offrant des possibilités et des facilités d’investissement au pays, avec la garantie d’un minimum de sécurité générale. “Il importe aussi de promouvoir et de soutenir les institutions locales de services qui proposent la canalisation judicieuse de ces flux d’argent”, précise-t-il. Juriste et analyste financier, Madimba Kadima Nzuji, propose que les Etats africains puissent créer leurs propres agences de transfert ou qu’ils puissent entrer dans le capital de celles qui sont sur leurs territoires. En outre, préconise-t-il, l’Etat peut obliger les agences de transfert à baisser leurs prix. Ce qui pourrait entraîner une augmentation soit des volumes de transfert, soit des montants envoyés.
A l’heure actuelle, le coût des envois est très élevé en Afrique, avec une moyenne de 12,4%. Selon la Banque mondiale, baisser le coût des transferts à 5% pourrait faire économiser quatre milliards de dollars à la diaspora africaine. Mais le directeur général de Money Trans explique ces coûts élevés par le fait que les sociétés de MF surtout en Afrique subsaharienne demeurent physiques, c’est-à-dire basées sur un service physique et une logistique matérielle conséquente. “Cela constitue des charges financières. En outre, si le régime fiscal des pays est contraignant, il va naturellement les obliger à réajuster leurs tarifs au risque de disparaître”, note-t-il. Selon Patrice Buabua, c’est toute la problématique du risque que représente la zone Afrique (fiscalité inadaptée, tracasseries administratives, etc.) qui s’exprime sur le prix de la prestation. “Ces transferts ont un coût relativement élevé certes mais, vu les résultats annuels des sociétés de MFI, cette situation accrédite aussi la thèse selon laquelle le risque peut être un facteur d’augmentation des profits”, nuance le Secrétaire général de la FIBANK. Pour Madimba Kadima Nzuji, l’Etat doit donc soit multiplier les acteurs par des incitants, soit obliger les agences à baisser les prix.
Dans tous les cas, la diaspora africaine demeure une force financière avec laquelle les gouvernements devront compter pour booster les économies locales.
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